Actualités du laboratoire | 2019
Colloque "Les degrés de la citoyenneté. Question coloniale, race et droits"
Du 18 au 20 septembre 2019, Université de Nantes
Colloque
Les degrés de la citoyenneté. Question coloniale, race et droits
Du 18 au 20 septembre 2019 de 9h00 à 17h30
Lieu : MSH Angé Guépin, Amphithéâtre - 5 allée Jacques Berque - Nantes
Organisé par Claude-Olivier Doron (Université Denis Diderot 7), Federica Morelli (Université de Turin) et Clément Thibaud (EHESS, Mondes Américains)
♦ Voir le programme complet
Colloque final du programme CITER, il se déroulera en deux temps :
18 et 19 septembre 2019
1/ Question raciale et question coloniale dans les courants progressistes du premier XIXe siècle
Ce colloque part d’un double constat que l’historiographie a contribué récemment à mettre en avant. D’une part, l’importance jouée par divers groupes progressistes ou réformateurs, critiques des hiérarchies et des statuts fixes de l’Ancien régime, soucieux de promouvoir une société fondée sur les capacités naturelles, l’industrie ou le mérite, dans la problématisation de la question des races humaines dans le premier XIXe siècle. Qu’il s’agisse de libéraux, de républicains ou de personnes inspirées par les mouvements d’organisation sociale, saint-simoniens ou socialistes, tous ont joué un rôle considérable dans la mobilisation de la question raciale en politique et en économie. Ce rôle, complexe, mérite d’être étudié et pris au sérieux, en analysant les tensions ou les rapports qui existent entre la promotion d’une société orientée vers l’égalité des droits, voire vers l’égalité sociale, et les réflexions portant sur les inégalités naturelles entre races; entre des doctrines résolument critiques de l’esclavage, promouvant soit le libéralisme économique, soit des modes d’organisation du travail, et la prise en compte des capacités ou des aptitudes raciales distinctes. L’objectif premier de cette journée consistera donc à faire le point sur ces enjeux, dans une perspective transatlantique, à travers tant un examen des doctrines que des pratiques ou des projets politiques elles ont peu donner lieu.
D’autre part, l’historiographie récente a contribué à mettre en avant le rôle joué par ces mêmes groupes, depuis la fin du XVIIIe siècle, pour repenser le système colonial et promouvoir des formes de colonisations nouvelles, fondées sur la mise en valeur des territoires, l’ouverture de nouveaux débouchés, la mise en activité des capitaux, des terres et des hommes, et des rapports de travail non-esclavagistes. On peut songer tant aux projets de colonisation de l’Afrique portés par la seconde Société des Amis des Noirs qu’aux diverses utopies d’inspiration fouriéristes ou saint-simoniennes en Amérique du Sud ou en Afrique du Nord, ou encore aux nombreuses réflexions socialistes ou républicaines visant à orienter la nouvelle colonisation de l’Algérie dans les années 1830-1840. Il s’agira donc de réfléchir à la manière dont ces projets s’inscrivent dans les réflexions économiques et politiques plus larges de ces différents courants et, le cas échéant, comment la question raciale proprement dite s’y articule.
En théorie sociale, la citoyenneté se situe exclusivement à l'intérieur du site de l'État et l'historicité du concept de citoyenneté est étroitement liée à l'historicité du concept d'État-nation. Cela implique, d'une part, une rupture avec les périodes antérieures où l'"appartenance" se situait le plus souvent dans la doctrine de l'allégeance, c'est-à-dire la notion de subjectivité ; d'autre part, en se focalisant trop sur ses aspects normatifs, elle ignore la dimension sociale de la citoyenneté. En fait, la citoyenneté ne peut être réduite à une relation directe d'un individu avec l'État, sans qu'une autre affiliation n'intervienne. Depuis ses débuts jusqu'à nos jours, la citoyenneté a toujours eu un contenu culturel : il s'est toujours posé la question de savoir quelle sorte de personnes étaient "dedans" et quelle sorte "dehors". Pourtant, l'idée de la relation d'un individu à l'État, sans autre affiliation, a toujours été une forme de revendication et non une essence de la citoyenneté, et les débats sur la relation de la citoyenneté à d'autres formes d'affinités sociales se poursuivent depuis longtemps au sein des collectivités de citoyens.
20 septembre 2019
2/ Citoyenneté et résidence
Nous avons cherché à réunir un groupe interdisciplinaire de chercheurs travaillant dans les domaines de l'histoire coloniale, de l'histoire juridique et des études sur la citoyenneté pour explorer la construction de la citoyenneté dans les contextes coloniaux et postcoloniaux. Cette perspective coloniale et impériale permet de rompre l’association naturalisée entre citoyenneté et nation pour identifier des modes d’appartenance ou d’allégeances investies dans des collectivités et des formes organisationnelles infra-étatiques, comme les villes ou les groupes ethniques, ou supra-étatiques. L'historiographie des empires modernes et contemporains a démontré que ces formations politiques multicommunautaires ont créé des catégories d'appartenance segmentées qui définissaient un accès différentiel aux droits, renforçant l'inégalité entre ses différentes unités constituantes. A travers l'analyse de diverses expériences, du XVIe au XXe siècle, la journée vise à examiner les statuts des personnes vivant dans des contextes coloniaux et postcoloniaux destinés à assurer l'hétérogénéité des régimes de citoyenneté.
Cette conférence invite les chercheurs à réfléchir sur les thèmes ou les pistes de recherche suivants :
- l'étude de la citoyenneté comme un processus plutôt qu'un statut qui garantirait certains droits et privilèges ;
- l'enchevêtrement entre la dimension verticale de la citoyenneté (soumission à un roi ou à un État impérial) et ses liens horizontaux (intégration dans une communauté) ;
- la pertinence de l'expérience coloniale pour définir la citoyenneté dans les métropoles européennes.
Contact : crhia@univ-nantes.fr
CRHIA
02 53 52 25 92
PROGRAMME
Mercredi 18 septembre 2019
Après-midi
Retour sur la « colonisation nouvelle »
13h45 Accueil des participants
14h00 Introduction
14h30 Marie LAURICELLA - Université Lumière Lyon II
« Algérie, terre promise ». La doctrine buchézienne et la question coloniale (1830-1848)
15h15 Frédéric MASSÉ - Université Jean-Jaurès
« L’empreinte de l’utopie » : Gustave d’Eichthal et la colonisation de la Grèce dans les années 1830
16h00 Pause
16h15 Clément THIBAUD - EHESS – Mondes Américains, CitEr
Après la traite : travail, race et colonisation dans les républiques hispano américaines à l’ère du méridien impérial (1800-1900)
17h00 Discussion
18h30 Conférence
Bernard GAINOT - Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Empires en transition. Esclavage, colonisation, civilisation (1770 - 1840)
Jeudi 19 septembre 2019
Race, esclavage et répertoires progressistes au XIXe siècle
09h30 Claude-Olivier DORON - Université Paris Diderot
« Races et pensée libérale dans les années 1815-1830 : le groupe du Censeur européen »
10h15 Loïc RIGNOL - Université de Franche-Comté
Les saint-simoniens et l’affamiliation des races
11h00 Pause
11h15 Albert GARCÍA-BALAÑA - Universitat Pompeu-Fabra, GRIMSE
Democracy and Colonial Imagination in mid-19th century Spanish Republicanism: Transatlantic and Transimperial Meanings of Fernando Garrido’s ‘Raza Ibérica’
12h00 Discussion
Esclavage, abolitions et répertoires progressistes
14h00 Gilles JACOUD - Université de Saint-Étienne
L’esclavage colonial : une comparaison des approches de Say, Sismondi et des saint-simoniens
14h45 Stéphanie MORANDEAU - Université de Nantes, CitEr
Colonialisme et question raciale dans la philosophie comtienne
15h30 Pause
15h45 Karim GHORBAL - Université de Tunis - El Manar
Réformistes cubains et libéraux français face à la question de l’esclavage au cours du premier XIXe siècle : horizons croisés
16h15 Céline FLORY - CNRS - Mondes Américains
Les « immigrants » africains engagés dans la Caraïbe française au XIXe siècle
17h00 Discussion
Vendredi 20 septembre 2019
Citoyenneté, résidence, colonialité
09h30 Valeria DEPLANO - Università degli studi di Cagliari
Citizenship and residence in colonial and postcolonial contexts
10h15 Félicien LEMAIRE - Université d’Angers - CitEr
Identité nationale et citoyenneté dans le droit colonial français
11h00 Pause
11h15 Federica MORELLI - Università degli studi di Torino
Entre citoyenneté et étrangeté. Les libres de couleur dans l’Atlantique espagnol à l’époque des indépendances.
11h30 Cristina NOGUEIRA DA SILVA - Universidade Nova de Lisboa
Colonial law and «liminality» in Portuguese Empire (19th-20th century)
12h15 Discussion
Fluidité sociales et spatiales de la citoyenneté
14h00 Tommaso BOBBIO - Università degli studi di Torino
The paradox of permanent temporariness and the construction of informality in Ahmedabad, India (1960s-2000s)
14h45 Olivier ALLARD - EHESS - LAS
La communauté introuvable : relation à l’État et organisation locale d’une population amérindienne (Venezuela)
15h30 Pause
15h45 Remarques finales et discussion
Actualités
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